Alexis Pazoumian
découvre la photographie à 20 ans, lors d'un voyage en Jordanie, et
devient très vite un passionné de l'image. Entre pureté documentaire et
recherche esthétique, ses photographies reflètent le monde, tout en
s'éloignant des clichés habituels. Rencontre avec un jeune talent très
prometteur.
Photographie.com : Vous avez commencé la photographie il y a quatre ans…
J'ai commencé la photo à
l'âge de 20 ans en empruntant l'argentique de mon père lors d'un voyage
en Jordanie. Tout de suite j'ai pris énormément de plaisir : la photo
est un médium très simple pour exprimer notre ressenti sur ce qui nous
entoure, et un moyen extraordinaire pour rencontrer des gens.
J'ai continué à pratiquer
l'argentique de façon très régulière. C'est parfait pour débuter, car on
se doit de prendre son temps pour chaque photo et de faire les réglages
soi-même ; vu que le nombre de prises est limité (et coûteux !), on est
bien plus exigeant qu’avec un appareil photo numérique.
Travailler en argentique est
un exercice parfait pour commencer, mais qui n'est pas forcément adapté à
mes travaux de reportages : j’ai donc investi rapidement dans un
appareil photo numérique, qui me permet de prendre 500 photos dans une
journée ! Mais j’emporte toujours mon argentique avec moi lorsque je
pars en voyage, et j’ai l’intention de m’y remettre plus sérieusement.
Photoraphie.com : Votre travail photographique est un mélange éclectique de genres…
J'aime traiter des sujets
très différents, innover, expérimenter, trouver de nouvelles idées et
les exploiter. J'ai commencé par prendre en photo des usines et
bâtiments désaffectés : la symétrie, les perspective et l'architecture
m'intéressaient. Ensuite, j'ai vécu durant six mois à Rio de Janeiro
dans une favela, où j'ai réalisé un photoreportage. J'ai réalisé un deuxième photoreportage en Arménie, mon pays d'origine.
Aujourd'hui, j'ai de nouveaux projets de mise en scène totalement différents de ce que j'ai pu réaliser auparavant.
Photographie.com : La plupart de vos séries se situent à la convergence entre reportage et recherche esthétique…
Durant mes deux reportages,
au Brésil et en Arménie, j'avais de réels message à faire passer, je
voulais raconter une histoire, mais je cherchais aussi à obtenir une
qualité esthétique à chacune de mes photos.
Lorsque je voyage, je suis
intéressé avant tout par le contact avec les gens : on comprend un pays
et une culture avant tout à travers sa population. Chaque rencontre est
unique, et certaines photos sont spontanées, car la surprise est
permanente. Mais parfois elles sont réfléchies. Lors de mon séjour en
Arménie par exemple, je me suis retrouvé dans une église pendant la
messe, et j’ai vu qu’un jet de lumière pénétrait par l’un des vitraux et
rendait la luminosité irréelle. Il m’a fallu attendre 30 minutes pour
que le rayon vienne éclairer le visage de deux enfants qui chantaient
pour pouvoir prendre ma "photo parfaite" ! Je considère qu’il n'y a
aucune règle en photo, et mon but est surtout d'essayer d’être juste
dans mon travail afin de partager mes émotions, et d'exprimer des
sentiments tout en cherchant une esthétique commune dans les images que
je produis.
Photographie.com : En Arménie, vous êtes revenu sur les traces de vos origines…
Le projet en Arménie a été
réalisé pendant l'été 2012. Étant d'origine arménienne, j'avais le
souhait depuis fort longtemps de découvrir mon pays à travers la photo.
Une fois diplômé j'ai décidé d'y retourner.
Ce photoreportage a été
réalisé pour la grande majorité dans des villages se situant au nord du
pays, dans la région du Lori près de la Georgie. J'ai découvert, dans
ces villages, les rites et la culture des Molokans (communauté religieuse née en Russie dans les années 1550, NDLR), totalement
différentes de celles du reste du pays. J'ai pu photographier le
quotidien et l'intimité des villageois arméniens qui m'ont ouvert leurs
portes en toute simplicité.
Photographie.com : Votre séjour à Rio a été tout aussi passionnant…
Je suis parti à Rio dans le
cadre de mes études, sans avoir prévu d'y faire un reportage. Le fait
d'y vivre et de réaliser ce projet m'a permis de comprendre à quel point
l'image que nous nous faisons des favelas est fausse : la
favela n'est pas un bidonville, c'est un véritable village, avec ses
commerces, ses écoles et ses églises. La plupart des gens y sont heureux
et souhaitent y rester.
Mon objectif était assez simple, offrir un point de vue objectif sur la population des favelas, en la saisissant, le plus possible, dans son environnement quotidien. Faire sortir les habitants des favelas
de l’anonymat et de l’indifférence, montrer que ces bidonvilles ne se
résument pas qu’à la violence et aux trafic de drogue, voila le but de
ce reportage.
Photographie.com : Les photographes que vous admirez le plus…
Le photographe tchèque
Miroslav Tichy, qui avait une conception unique de l'art, m'a toujours
fasciné. Il y a aussi Lisette Model, Diane Arbus, Elliott Erwitt, pour
leurs photos humanistes, Stanley Kubrick pour ses premiers reportages
photos et Gregory Crewdson pour ses mises en scène incroyables.
Photographie.com : Quels sont vos projets futurs ?
Le cinéma me passionne autant
que la photo, je réaliserai prochainement un court métrage et un clip
de musique. En attendant un prochain voyage photographique…
Propos recueillis par Roxana Traista
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