dimanche 23 décembre 2012

Rencontre avec Alexis Pazoumian

Alexis Pazoumian découvre la photographie à 20 ans, lors d'un voyage en Jordanie, et devient très vite un passionné de l'image. Entre pureté documentaire et recherche esthétique, ses photographies reflètent le monde, tout en s'éloignant des clichés habituels. Rencontre avec un jeune talent très prometteur. 

Photographie.com : Vous avez commencé la photographie il y a quatre ans…
J'ai commencé la photo à l'âge de 20 ans en empruntant l'argentique de mon père lors d'un voyage en Jordanie. Tout de suite j'ai pris énormément de plaisir : la photo est un médium très simple pour exprimer notre ressenti sur ce qui nous entoure, et un moyen extraordinaire pour rencontrer des gens. 
J'ai continué à pratiquer l'argentique de façon très régulière. C'est parfait pour débuter, car on se doit de prendre son temps pour chaque photo et de faire les réglages soi-même ; vu que le nombre de prises est limité (et coûteux !), on est bien plus exigeant qu’avec un appareil photo numérique.
Travailler en argentique est un exercice parfait pour commencer, mais qui n'est pas forcément adapté à mes travaux de reportages : j’ai donc investi rapidement dans un appareil photo numérique, qui me permet de prendre 500 photos dans une journée ! Mais j’emporte toujours mon argentique avec moi lorsque je pars en voyage, et j’ai l’intention de m’y remettre plus sérieusement.

Photoraphie.com : Votre travail photographique est un mélange éclectique de genres…
J'aime traiter des sujets très différents, innover, expérimenter, trouver de nouvelles idées et les exploiter. J'ai commencé par prendre en photo des usines et bâtiments désaffectés : la symétrie, les perspective et l'architecture m'intéressaient. Ensuite, j'ai vécu durant six mois à Rio de Janeiro dans une favela, où j'ai réalisé un photoreportage. J'ai réalisé un deuxième photoreportage en Arménie, mon pays d'origine. 
Aujourd'hui, j'ai de nouveaux projets de mise en scène totalement différents de ce que j'ai pu réaliser auparavant. 
Photographie.com : La plupart de vos séries se situent à la convergence entre reportage et recherche esthétique…
Durant mes deux reportages, au Brésil et en Arménie, j'avais de réels message à faire passer, je voulais raconter une histoire, mais je cherchais aussi à obtenir une qualité esthétique à chacune de mes photos. 
Lorsque je voyage, je suis intéressé avant tout par le contact avec les gens : on comprend un pays et une culture avant tout à travers sa population. Chaque rencontre est unique, et certaines photos sont spontanées, car la surprise est permanente. Mais parfois elles sont réfléchies. Lors de mon séjour en Arménie par exemple, je me suis retrouvé dans une église pendant la messe, et j’ai vu qu’un jet de lumière pénétrait par l’un des vitraux et rendait la luminosité irréelle. Il m’a fallu attendre 30 minutes pour que le rayon vienne éclairer le visage de deux enfants qui chantaient pour pouvoir prendre ma "photo parfaite" ! Je considère qu’il n'y a aucune règle en photo, et mon but est surtout d'essayer d’être juste dans mon travail afin de partager mes émotions, et d'exprimer des sentiments tout en cherchant une esthétique commune dans les images que je produis.

Photographie.com : En Arménie, vous êtes revenu sur les traces de vos origines…
Le projet en Arménie a été réalisé pendant l'été 2012. Étant d'origine arménienne, j'avais le souhait depuis fort longtemps de découvrir mon pays à travers la photo. Une fois diplômé j'ai décidé d'y retourner.
Ce photoreportage a été réalisé pour la grande majorité dans des villages se situant au nord du pays, dans la région du Lori près de la Georgie. J'ai découvert, dans ces villages, les rites et la culture des Molokans (communauté religieuse née en Russie dans les années 1550, NDLR), totalement différentes de celles du reste du pays. J'ai pu photographier le quotidien et l'intimité des villageois arméniens qui m'ont ouvert leurs portes en toute simplicité.


Photographie.com : Votre séjour à Rio a été tout aussi passionnant…
Je suis parti à Rio dans le cadre de mes études, sans avoir prévu d'y faire un reportage. Le fait d'y vivre et de réaliser ce projet m'a permis de comprendre à quel point l'image que nous nous faisons des favelas est fausse : la favela n'est pas un bidonville, c'est un véritable village, avec ses commerces, ses écoles et ses églises. La plupart des gens y sont heureux et souhaitent y rester. 
Mon objectif était assez simple, offrir un point de vue objectif sur la population des favelas, en la saisissant, le plus possible, dans son environnement quotidien. Faire sortir les habitants des favelas de l’anonymat et de l’indifférence, montrer que ces bidonvilles ne se résument pas qu’à la violence et aux trafic de drogue, voila le but de ce reportage.

Photographie.com : Les photographes que vous admirez le plus…
Le photographe tchèque Miroslav Tichy, qui avait une conception unique de l'art, m'a toujours fasciné. Il y a aussi Lisette Model, Diane Arbus, Elliott Erwitt, pour leurs photos humanistes, Stanley Kubrick pour ses premiers reportages photos et Gregory Crewdson pour ses mises en scène incroyables.
Photographie.com : Quels sont vos projets futurs ?
Le cinéma me passionne autant que la photo, je réaliserai prochainement un court métrage et un clip de musique. En attendant un prochain voyage photographique…
Propos recueillis par Roxana Traista





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