dimanche 23 décembre 2012

Fernando Moleres. En attendant la liberté

Le photographe espagnol Fernando Moleres a remporté, le 10 décembre dernier, la Tim Hetherington Grant, pour son travail sur les mineurs incarcérés, intitulé Waiting for an opportunity. Créée en 2011 par World Press Photo et Human Rights Watch en l'honneur du photojournaliste et réalisateur Tim Hetherington (tué en Libye en 2011), la bourse vise à soutenir un projet photographique sur le thème des droits humains. Interview.

Photographie.com : Vous avez commencé ce travail en 2007, lorsque vous avez réalisé un premier photoreportage dans une prison de Sierra Leone. Qu'est ce qui vous a donné envie d'aborder ce sujet ?
L'idée m'est venue après avoir vu, dans le cadre du festival Visa pour l'image 2007, l'impressionnant reportage réalisé par Lizzie Sadin sur les mineurs incarcérés. J'ai été particulièrement touché par les conditions de vie épouvantables de ces jeunes mis derrière les barreaux partout en Afrique. Lorsque j'ai commencé à faire des recherches sur ce sujet tragique, j'ai découvert de nombreux reportages écrits racontant leur histoire, mais très peu d'images. D'où ma décision de réaliser un travail photographique qui puisse sensibiliser le public aux problèmes des jeunes prisonniers et briser le mur de silence qui les entoure.

Photographie.com : Vous avez réalisé des centaines de photos sur ce sujet, mais vous avez aussi fondé une ONG dédiée à la protection de leurs droits…
Mon travail sur les mineurs incarcérés a été publié dans la presse européenne (The Independent, Le Monde Magazine, The Sunday Times, Liberation, NZZ, El País Semanal, etc), mais ces articles n'ont eu qu'un rôle d'information. Je me suis rendu compte que, si je souhaitais vraiment aider ces jeunes, je devais aller encore plus loin. J'ai ainsi créé FREE MINOR AFRICA (FMA), un projet qui offre de l'aide juridique aux jeunes arrêtés pour des délits mineurs en Sierra Leone. Notre association vise également à faciliter leur réinsertion dans la société : nous offrons de l'hébergement à tous ceux qui viennent de sortir de prison, et qui n'ont personne pour les accueillir. 
Si la vie de ces personnes est aujourd'hui meilleure, c'est grâce non seulement à mon travail photographique, mais aussi à mon engagement personnel. Mes objectifs : améliorer leur vie à l'intérieur de la prison, mais aussi à l'extérieur, grâce à notre programme de réinsertion.  
Photographie.com : Vous disiez, l'année dernière dans une interview, que la grande majorité des institutions internationales et ONGs ont choisi d'ignorer ce problème. Cette situation a-t-elle évolué ?
Dès le début, je me suis rendu compte que personne ne s'intéressait au sort de ces jeunes, et rien n'a changé depuis. Je sais qu'il y a beaucoup de problèmes dans le monde - la vie de ces jeunes n'est qu'une tragédie parmi tant d'autres.   
Photographie.com : Le jury de la Tim Hetherington Grant a déclaré, à propos de votre travail, qu'il "se situait à la frontière entre l'actualité et le photojournalisme d'investigation"…
Je pense que ce type de travail, qui transcende le photojournalisme, reflète la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui, du mouvement Occupy Wall Street aux Etats-Unis au mouvement 15M en Espagne. Cela veut dire que nous devons jouer un rôle plus important au sein de notre société, et agir d'une façon beaucoup plus responsable. 
Propos recueillis par Roxana Traista 


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