jeudi 20 décembre 2012

Boris Joseph / Poudroiement

— Poudroiement, poudroiement du temps à travers les kalpas

Des silhouettes sépulcrales et sans verbe s’en vont pulvéruler dans l’essaim des fidèles. Le tan qui les atteint et matifie leur peau s’épanche depuis le ciel en photons ; l’appeau du mât dressé comme un Mérou lapidaire fait graviter la foule fuligineuse
Chaque parcelle de poussière s’en vient d’où elle s’en fut, matrice des astres et pour les aimer triste désastre lorsque la roue du temps est sans figure, foudroyante lenteur écrasés par la route
Effluences de matière, écoulements granités de lumière - le vide est condensé en phénomènes dont la vêture est ordinaire
A la mesure du corps l’infini de la terre
Grand véhicule sans conducteur : bardés de liens, chargés de baux, ceux de Töbod pensent au Bardo. Le dur grain de peur oui se broie ! pas chez le meunier de l’Histoire, cousin de Qin, roulant camions brodés de Gardes rouges, mais grâce à Padma Sambhava et son école de Bonnets rouges !
Peuple de nomades en un monde éphémère, marcheront pris dans la toile d’ananké, réticules très ordonnés du Grand véhicule et dense vortex où s’effacent les âmes bien nées
Ô sans visage qui nous envoie en particules dans ce grand froid sur pellicule en quoi as-tu foi ?
Rien d’autre sous la bâche du réel que ces regards qui nous traversent ou nous évitent. Ces mains avides brûlent encore de trop de vie.
Dans le Bardo, il sera seul, comme sur ce manteau de mantras ; les forces centrifuges du malheur lieront son beurre, et les déités fulminantes lui feront peur. Aura-t-il la force de reconnaître derrière ces rugissements le son sacré des Six Syllabes : Om-mâ-nî-pây-mé-Hûng ?
Trois points d’appui sur le sentier des bons souhaits, l’oreille intérieure tendue vers le son du poudreux réel : un millier de tonnerres à transmuer en un silence de diamant

P.-S.

Le Tibet mythique d’Alexandra David Neel est aujourd’hui bien différent de celui découvert au début du XXème siècle par l’aventurière. Occupé depuis plus de 50 ans, il ne cesse de se transformer. Le gouvernement chinois investit des sommes considérables pour accroître son influence dans cette région. Au-delà du folklore tibétain, que le gouvernement de Pékin met en avant dans ses dépliants touristiques, ce travail photographique met un visage sur une occupation souvent silencieuse et invisible. Il montre également une culture tibétaine qui, malgré la répression, est encore bien vivante.
Né à Paris en 1974. Après des études d’architecture et d’arts plastiques, Boris Joseph découvre la photographie et la vidéo au cours de missions humanitaires en Palestine et en Inde. C’est le point de départ d’une série de nombreux voyages qui le ramèneront sans cesse en Asie. En parallèle à son travail photographique, il réalise également son premier documentaire vidéo, « Au fin Moka » qui dépeint le quotidien de deux vieilles dames dans un café parisien. Il a exposé un travail sur le Tibet au festival off de Honfleur en 2004, et il a obtenu la mention spéciale du 32ème Prix Kodak de la Critique Photographique en 2007 pour la série « Saga Dawa, pèlerinage dans l’ouest tibétain ».









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